Alimentation, Santé, Sanctification

Que l’alimentation ait un lien avec la bonne santé, tout le monde en convient ; mais la progression spirituelle dépend-elle aussi de la nourriture consommée ? Cette question a été, du temps de Jésus et des premiers chrétiens, au centre de débats importants. Les deux autres religions monothéistes (Judaïsme et Islam) ont conservé des règles spécifiques pour l’alimentation, règles qui nous surprennent. Quel est le point de vue chrétien ?

 Quel est le critère d’une alimentation correcte ? Il faut le reconnaître, notre alimentation ne suit que modérément les recommandations de la diététique et obéit, le plus souvent, aux habitudes et contraintes personnelles ou collectives. Nous avons la chance, dans notre pays, d’un large choix d’aliments en toute saison. Cependant, nos goûts ne sont plus uniquement dépendants des habitudes familiales ; la publicité et l’offre commerciale y jouent un rôle très direct. Au point qu’une dérive, dangereuse, donne trop de poids aux aliments préparés industriellement, calibrés sur des critères de vente. On voit les effets directs d’une telle dérive, par exemple, dans le développement de l’obésité, surtout parmi les jeunes.

Notre civilisation doit donc réfléchir à ses choix alimentaires, en vue de la protection de la population, tout comme elle le fait en ce moment pour l’écologie et le devenir de la planète.

Nos ancêtres ont eu aussi à faire des choix pour leur alimentation à partir de contraintes bien différentes des nôtres, mais avec le même souci de trouver le meilleur équilibre entre ces contraintes et leur santé. Si nous nous référons aux Hébreux, nous voyons comment se sont élaborées, dans les temps bibliques, des règles alimentaires adaptées à la vie semi-nomade de la steppe ou du désert. Issues de l’observation et de traditions ancestrales, ces règles, essentielles pour l’avenir de la collectivité, ont été intégrées aux livres sacrés et, par conséquent, reconnues comme venant de Yahvé. Certaines résultent d’un classement que nous aurions du mal à entériner. Ainsi, on peut manger la viande du bœuf car il est ruminant et il a des sabots pointus et fendus, mais pas du chameau, qui est un ruminant et possède des sabots fendus mais pas pointus, ni du lapin qui est (considéré comme) ruminant mais possède des pieds griffus et non des sabots. Le porc possède des sabots pointus et fendus, mais n’est pas un ruminant. Sa viande est de ce fait impure à exclure de l’alimentation et des offrandes sacrificielles. Il y a également des règles pour les oiseaux, qui excluent les prédateurs et les nécrophages, d’autres pour les poissons, crustacés, etc., d’autres encore pour les insectes (1).

L’élimination de la viande de porc peut nous paraître excessive, à nous qui en consommons si régulièrement. Mais le porc peut héberger de dangereux parasites, comme la trichine ou le ténia, source de contaminations dangereuses, sinon mortelles pour l’humain, si la viande n’est pas correctement cuite, ce qui, dans la vie semi-nomade de l’époque, n’était pas toujours faisable. Le cheval (sabots non fendus, donc impur) peut aussi héberger la trichine et sa viande est interdite.

L’animal doit être saigné. Le sang, à l’époque biblique, est réputé porter la vie et les traits de caractère de l’animal ; consommé par l’homme, il affaiblirait sa personnalité.

Jésus, et après lui Saint Paul, ont assoupli, sinon supprimé, ces règles alimentaires contingentes. Non qu’ils aient voulu ignorer la nocivité de certains aliments, mais pour marquer la prééminence de ce qui vient du cœur (la disposition d’esprit et la bienveillance active) sur le respect scrupuleux de règles rituelles. « Ce n’est pas ce qui entre dans la bouche qui souille l’homme. Mais ce qui sort de la bouche … vient du cœur et c’est ce qui souille l’homme. » a dit Jésus (Mt 15, v.11 et 18).

Ainsi pour le chrétien, le partage de la nourriture et l’attention, sur ce point, aux plus démunis, est le vrai critère d’un usage des aliments conforme à la volonté divine et propre à aider au développement spirituel. Le reste est laissé à l’appréciation des groupes humains et aux choix personnels, éclairés si possible par des connaissances diététiques.

Daniel Pasquiet

 

(1) Ces règles sont extraites du Lévitique, livre de la Bible. D’autres interdits alimentaires ont un caractère universel : ne pas manger la chair de son semblable, ni celle d’animaux trouvés morts, etc.

 

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