Au service de l’aide active à vivre
En ce mois de mai où nous interviewons un dessinateur humoristique, j’aurais bien aimé consacrer l’édito à un sujet léger mais l’actualité en a voulu autrement. En effet, il y a eu d’une part le texte des évêques de France publié le 28 mars et d’autre part, le 2 avril, la remise des conclusions de la convention citoyenne sur la fin de vie.
« La convention citoyenne fait émerger une position majoritaire : celle de la nécessité de mettre en place à la fois le suicide assisté et l’euthanasie, dans la mesure où le suicide assisté seul ou l’euthanasie seule ne répondent pas à l’ensemble des situations rencontrées ».
A quelles questions de fond l’être humain veut-il répondre ? Je souhaite mourir dans la dignité. C’est bien entendu ce que nous souhaitons tous. Mais être diminué, malade et souffrir, serait-ce indigne ? Par contre, appréhender sa fin de vie est une inquiétude humaine légitime. Doit-on accepter la mort naturelle quelles que soient les circonstances ? C’est la grande question posée par la société. La réponse a jusqu’alors été de proposer l’accompagnement avec la création des soins palliatifs (loi Leonetti). Il est important de souligner que les membres de la convention citoyenne préconisent le renforcement et l’accès pour tous aux soins palliatifs.
Rendons hommage aux soignants qui font dans ces services un travail remarquable d’accompagnement dans un esprit de respect de la dignité et le souci de soulager la souffrance. De nombreux accompagnants, médecins, infirmières, aides-soignantes mais également aumôniers, laïcs visiteurs de malades, membres de la famille disent que, lorsque la personne en fin de vie est accompagnée, soulagée, entourée mais surtout aimée, elle ne demande pas une mort anticipée. J’en atteste personnellement ayant eu à vivre cet accompagnement pour des personnes chères à mon cœur.
C’est le sens de l’intervention des évêques de France dans leur lettre intitulée : L’aide active à vivre, un engagement de fraternité que nous publions en page 7 « Chercheurs de Dieu ». Mais ils nous mettent en garde contre l’injonction de renoncer à vivre que ferait peser sur les personnes fragiles la facilité légale et économique de « l’aide active à mourir ». « Nous aimons et nous croyons à la liberté. Mais nous affirmons qu’elle ne peut se déployer que si la valeur de la vie de chacun est pleinement reconnue et respectée. C’est dans ce cadre protecteur qu’il convient de mettre en œuvre tous les chemins possibles d’aide active à vivre ». C’est le sens également de l’appel de Philippe Pozzo di Borgo (voir notre article dans notre n° de février 2022), qui a créé depuis le collectif « Soulager mais pas tuer ».
Sans porter de jugement, la mise en place de l’aide active à mourir ou le suicide assisté, soulèvent d’autres questions (voir article sur euthanasie – soins palliatifs dans les Echos de février 2022), en particulier « sur qui » doit intervenir ? L’ordre des médecins « sera défavorable à la participation d’un médecin à un processus qui mènerait à une euthanasie, le médecin ne pouvant provoquer délibérément la mort par l’administration d’un produit létal ».
Par ailleurs, certains soignants belges disent que la loi a créé le besoin. Enfin, ne devons-nous pas craindre des abus et des dérapages ? N’allons-nous pas créer une société du contrôle du droit à vivre et à mourir sur des critères physiques et économiques ? Ne risquons-nous pas de tuer la dimension spirituelle de l’être ? Tout cela appelle à la réflexion mais restons résolument dans l’espérance et faisons appel à la conscience de chacun. Donnons beaucoup d’amour aux autres quelles que soient les situations et soutenons-nous pour donner du sens et du goût à la vie !
Yves Maretheu rédacteur en chef