Des clés de discernement
Depuis Léon XIII, à la fin du XIXème siècle, l’Eglise donne un enseignement sur les questions économiques et sociales, sur les questions éducatives, familiales, écologiques. On le sait bien, entre libéralisme non régulé et communisme à l’économie collectiviste et planifiée, il y a toute une série de systèmes économiques et politiques qui ont été testés, qui sont de façon continue ajustés selon les équilibres entre le pouvoir politique (public ou oligarchique) et le pouvoir économique et financier (privé, mais pas seulement). L’Eglise, elle aussi, pape après pape, notamment par Paul VI, Jean-Paul II, Benoît XVI et François, a enrichi son discours en apportant des clés de discernement, sans toutefois proposer de » système » figé idéal, mais des » principes « . Quels sont-ils?
Il y a d’abord celui de la dignité inaltérable de la personne humaine. Etre social, solidaire, capable d’aimer, de choisir entre le bien et le mal, de se raisonner pour prendre garde à ses instincts. Pour le chrétien, la dignité d’une personne est d’avoir été créée à l’image de Dieu, d’être aimée de lui et d’être Sa présence qui se propose aux autres en vue de l’amitié, de la bienveillance, de la sanctification de tous et de chacun. Le travail humain a une dignité propre : celle de mettre en œuvre la créativité de l’homme, image de la Création de Dieu ; celle du service de l’homme, image du Serviteur Jésus. L’intuition, la force, la persévérance, la tempérance, etc…. de l’homme, disponible aux dons de l’Esprit Saint.
Ensuite, il y a le bien commun, qui est l’ensemble des conditions sociales permettant à chacun et à toute la communauté de grandir plus vite et plus parfaitement en humanité. Bien est à entendre au sens de » bien et mal « , mais aussi en tant que » moyen, matériel ou non » (il a de grands biens).
Puis, la question de la propriété privée, qui est nécessaire par son usage à l’exercice de la responsabilité des hommes. Cette responsabilité exercée dans la liberté, fait partie de la dignité de l’Homme : Caïn rétorque à Dieu après le meurtre d’Abel pour des questions de jalousie : » suis-je le gardien de mon frère ? « . Le collectivisme rend irresponsable : c’était un pronostic au XIXème siècle et cela a été vérifié et se vérifie encore, la nature humaine n’étant pas naturellement bonne, n’en déplaise à Rousseau. L’usage de nos propriétés est responsable s’il est effectué en vue du bien commun. La propriété privée, tout comme la liberté, sont les conditions nécessaires, des moyens de la dignité humaine et non des finalités : dans le cas contraire, elles se transforment vite en idoles, parfois sanguinaires (convoitise, jalousie, irrespect de l’autre au nom du Moi).
La subsidiarité est ce fameux concept qui vise à laisser à chaque niveau d’organisation toute sa responsabilité et les moyens nécessaires à l’exercer. Le niveau du dessus se rend serviteur du niveau inférieur lorsque, en cas de carence, il supplée. Subsidiarité n’est pas lâcheté ni despotisme : c’est un juste milieu.
Dans ses actes quotidiens, chacun doit agir en discernant le bien commun et ce n’est pas facile ! Et comme le pauvre (le dépendant, faible, fragile) est membre de la communauté, chacun est appelé, comme le Christ, à se dépouiller pour élever le pauvre dans sa dignité, pour servir le Christ lui-même, puisque son visage d’Homme nous montre le Père. Cela s’appelle « l’option préférentielle pour les pauvres » : c’est un critère pour nos choix quotidiens.
Tout découle de ces principes : les questions de développement des peuples, de respect de la vie, de la création, l’écologie, l’économie, la dignité éminente des familles et leur nécessaire stabilité pour la croissance des enfants et des parents, l’éducation (liberté scolaire), les principes moraux de l’éducation affective et sexuelle. Tout cela a sa cohérence et les développements de la » doctrine sociale de l’Eglise « , quel que rébarbatif que soit ce terme, montrent chaque jour leur justesse, leur pertinence, leur actualité. Prions pour que les décideurs les connaissent et les mettent en pratique !