LE PERE ANDRE MENYE
Depuis la nomination du père Simon Kéké comme curé du secteur de Breval, le Père Patrick Fournier assumait seul la charge de nos huit paroisses. Dorénavant il a un vicaire : le Père André Menyé, un Camerounais, que nous avons la joie d’accueillir. Il réside au centre Saint Nicaise de Vaux sur Seine.
Père André pouvez-vous tout d’abord nous parler de votre pays ?
Le Cameroun, un peu plus petit que la France, 475 442 km² (contre 552 000km²), est situé en Afrique centrale, dans la zone CEMAC, Communauté Economique et Monétaire d’Afrique Centrale avec le Gabon, la Centre Afrique, le Congo Brazzaville, le Tchad et la Guinée équatoriale qui ont en partage une monnaie unique, le franc CFA.
Cameroun dérive du portugais ; ses premiers colons, les marins de Ferdinando Poo au XVIe siècle, débarquant sur la côte occidentale, sont frappés par l’abondance de crevettes sur la côte qu’ils appellent « le Rio dos camarones », ce qui donnera Cameroun.
Ce pays n’a jamais été colonisé mais mis sous tutelle d’abord allemande puis, en 1918, partagé entre la France et l’Angleterre. La réunification des deux Cameroun s’est faite en 1972, gardant officiellement les deux langues afin d’éviter les rivalités tribales car en réalité, au Cameroun, il y a plus de deux cent soixante-dix langues !
Yaoundé, au centre, est la capitale administrative et Douala, au bord de la mer, est celle de l’économie ; elles sont distantes de 250 km. Si le climat est tropical, il varie du nord au sud, de sahélien à équatorial, en raison principalement de la différence des précipitations qui engendrent la variété de la flore comme de la faune.
Quelle politique au Cameroun ?
L’indépendance du Cameroun a été proclamée le 1er janvier 1960. La « République démocratique du Cameroun », définie le 18 janvier 1996, est de type parlementaire dont le président possède toutes les nominations importantes et le pouvoir exécutif.
Dix régions se partagent le territoire, dont deux sont anglophones, mais le gouvernement est centralisé à Yaoundé sous la présidence de Paul Biya qui a succédé en 1982 à Ahmadou Ahidjo, premier président de la république. Le régime assure la stabilité du pays.
Le Camerounais est intelligent, pacifique malgré quelques rivalités ethniques ; il n’aime pas le bruit ; il a le culte du diplôme, d’une scolarité avec référence, moyen de devenir un « big man ». Chaque ethnie a ses caractères propres ; ainsi on reconnaît aux Bamiléké leur sens de la solidarité, de l’entreprise et du commerce ; ils sont traditionnellement présents dans toutes les entreprises commerciales.
Que pouvez-vous nous dire au niveau religieux ?
Le Cameroun est un état laïc. Avant 1980, les musulmans et chrétiens (catholiques, protestants, orthodoxes et évangélistes) cohabitaient pacifiquement avec les animistes. Depuis lors, la branche évangéliste s’est multipliée en une pluralité de sectes, dans un enfouissement d’un monde religieux sans précédent, sous la houlette de la poche financière des Américains.
Après avoir évoqué votre pays et ses habitants, pouvez-vous nous parler de vous-même ?
Je m’appelle André, Marie, Claude Menyé ; je suis né le 9 octobre 1958 à Evodoula, chef-lieu d’arrondissement de cinq mille habitants à 60 km de la capitale Yaoundé, à l’ouest du département de la Lekié. Je suis le troisième d’une famille de quinze enfants (six filles et neuf garçons) nés d’un père, fils unique, qui fut directeur d’écoles catholiques tandis que notre mère restait au foyer pour nous élever. Famille très chrétienne, très engagée dans la vie des paroisses, je lui dois sans doute ma vocation. A dix ans, j’entre au petit séminaire et à dix sept ans, au grand séminaire. J’ai été ordonné à vingt-six ans, le 11 août 1985, à Yaoundé, par le Pape Jean-Paul II, lors de sa première visite au Cameroun ; nous étions seize nouveaux prêtres.
Après mon ordination, nous avons fondé « l’association des enfants de papa » afin d’assurer la cohésion familiale. Ainsi, nous nous retrouvons tous deux fois par an dans notre grande maison de famille. Jeune prêtre, j’ai été aumônier au lycée-collège d’Obala avec les fonctions de vicaire de paroisse puis, deux ans après, curé de la paroisse de Bibey, un petit village d’à peine trente habitants, à 300 km de Yaoundé. Pour l’atteindre il fallait faire seize heures de route ; d’autre part, pour la pastorale ambiante, je faisais parfois 40 km à pieds et toujours en pleine brousse. Mais quel accueil chaleureux m’attendait dans un village à visiter ! Ce furent les plus beaux moments de ma vie sacerdotale comme quoi : « le manque n’exclut pas la charité et la joie d’accueillir », tel le disait-on !
Après une autre paroisse, j’ai été envoyé quatre ans à Brest pour préparer deux licences de sociologie mais toujours avec une insertion paroissiale, en l’occurrence à Landivisiau, à 20 km de Brest. Puis ce fut le retour au Cameroun, je fus nommé directeur, plus exactement « délégué exécutif du CRAPT, Centre Rural d’Appui Technique », à 80 km de Yaoundé, dans le diocèse d’Obala. Je m’occupais alors des projets de réinsertion de jeunes, de préventions … Dans le cadre de cette mission, j’ai fait de nombreux voyages à l’étranger. J’étais en même temps curé de cinq paroisses et vicaire épiscopal. Ce furent dix années lourdes à porter mais passionnantes.
En 2003 ce fut le drame : un accident qui devait être mortel et entraînera bien des séquelles dont une dizaine d’interventions chirurgicales. Il m’a fallu attendre une année pour obtenir un visa et me faire soigner en France … Après Paris, Saint-Germain-en-Laye, j’arrivais à l’hôpital de Poissy et fis la connaissance de deux aumônières, Alice et Sylvie, qui m’ont soutenu et permis d’être intégré en 2004 au diocèse de Versailles. Mgr Aumonier me nomme l’année suivante à La Celle-Saint-Cloud auprès du Père Allouchery.
Après un bref séjour chez les sœurs servantes du Sacré Cœur de Jésus à Versailles, je reprends des études à la Sorbonne en 2006 et obtiens un diplôme de hautes études en sciences sociales et trois ans plus tard un master d’accompagnement individuel et collectif. Puis on me demande d’être curé, mais le médecin est réticent ; je rencontre alors Xavier Chavanne, en ce temps là vicaire à Saint Denis. En septembre 2006, nous arrivons aux Mureaux avec un projet pastoral spécifique pour une paroisse en milieu musulman et de la cité, un défi à relever : relancer la vie de cette communauté qui, de plus, avait des problèmes de gestion. Entre temps, j’ai encore subi cinq opérations dont la dernière au dos, en septembre dernier, de laquelle je ne suis pas encore complètement remis car il y a eu des complications ; j’ai dû rester trois mois allongé. Après neuf mois d’hospitalisation, j’ai fait deux mois de rééducation à Vannes avant de revenir aux Mureaux.
Comment tenir le coup à travers tant d’épreuves et toujours envisager l’avenir?
J’ai toujours gardé le moral. Avant mon grave « accident » de 2003, j’avais une santé de fer ! Cette longue maladie a été un temps fort de solidarité avec les souffrants mais aussi les soignants, les aumôniers et visiteurs divers.
Les instances diocésaines m’ont aussi accompagné ; ainsi le vicaire épiscopal m’a proposé, tout en restant aux Mureaux, de me mettre à la disposition de la paroisse de Meulan pour une année transitoire ; mais comme je ne souhaitais pas me partager entre les deux paroisses, c’est à Meulan que je suis envoyé depuis le 1er septembre pour prendre, avec le Père Patrick, la charge des âmes du secteur de la Rive droite de la Seine. Entendons-nous bien, il n’y a pas deux projets pastoraux, seulement celui du curé. En arrivant à Meulan, je réside à Vaux ; j’ai tourné la page des Mureaux tout en restant dans le même doyenné. Je suis bien intégré dans le diocèse qui me permet de servir la communauté chrétienne des Yvelines tout en me soignant.
Je remercie tous ceux qui de près ou de loin m’ont soutenu et continuent à le faire.
Merci Père André d’avoir permis aux Echos de Meulan de faire connaître celui qui vient au service de notre secteur paroissial. Je suis sûre que cela facilitera l’accueil de tous les habitants de nos huit communes et particulièrement des paroissiens.
(Propos recueillis par Gh. Denisot)