En suivant Michée
Originaire de Judée, le prophète Michée (Mikka dont le nom signifie en hébreu « Qui est comme Yah »), jeune contemporain d’Isaïe, vivait à l’époque troublée des rois Josias et Ezéchias où il fut le témoin horrifié de la chute de Samarie puis de la ruine définitive du royaume du Nord suivie de l’exil de sa population en 722 avant notre ère.
Malgré sa mise en accusation d’Israël, le thème final de son livre, bien qu’entremêlé de reproches, y marie aux paroles de réconfort d’autres riches d’espoir dont celle-ci : « On t’a fait savoir, ô homme, ce qui est bien : ce que le Seigneur réclame de toi : rien d’autre que d’accomplir la justice, de chérir la bonté et de t’astreindre à marcher avec ton Dieu. » (6,8)
Accomplir la justice, autrement dit faire régner la justice où le Droit coule à grands flots, libérer, être conforme au dessein de Dieu, pour chaque homme c’est entrer dans l’alliance avec Dieu grâce à une vie répondant à son projet.
Plus qu’une simple orientation du cœur, la bonté, la bienveillance, engage l’être humain, l’ouvre et en fait son horizon. Oser la bonté suppose de changer de regard, de laisser tomber les écailles obstruant notre perception habituelle, de voir au-delà de l’apparence en dépassant les présupposés. De cette bienveillante empathie le cœur y participe en s’ouvrant à l’autre, en l’accueillant quelles que soient sa différence, son étrangeté, voire sa complexion et ceci sans irénisme ou naïveté béate.
Le dernier élément du programme que Michée fait savoir à son peuple, celui de « marcher avec ton Dieu », ne manque pas de lui évoquer la marche d’Israël au désert sous la conduite de Yahwé « marchant avec lui, le jour dans une colonne de nuée pour lui indiquer la route, et la nuit dans une colonne de feu pour l’éclairer » (Exode 13, 21).
Cependant, pour nous, qui relisons son appel à des siècles de distance, la « marche avec Dieu » entre en résonance avec cette parole que Jésus adresse à ses disciples
(Mathieu 16,24) : « Si quelqu’un veut venir avec moi, … qu’il m’accompagne ». Ainsi, marcher avec Jésus revêt un sens d’une telle singularité, d’une telle force, qu’il nous hisse au niveau de son compagnonnage. Devenir le compagnon du Fils de Dieu, devenir celui qui, si l’on se réfère à l’étymologie, partage son pain, son essentiel avec Celui qui se donne totalement en partage, nous fait mesurer l’infinie confiance du Ressuscité marchant à notre côté sur le chemin que nous empruntons pour faire advenir la justice, pour oser cette bonté dont chaque humain peut faire son horizon et l’objet de son désir.