Ils ont eu cinquante ans en avril (suite)
Le boulevard périphérique de Paris
25 avril 1973, le boulevard périphérique de Paris, périph’ pour les intimes, est inauguré par le Premier ministre de l’époque, Pierre Messmer. Cette inauguration intervient treize ans après l’ouverture du premier tronçon et permet aux automobilistes de faire désormais le tour de Paris en 35,4 km. L’histoire précise qu’il faudra compter trente minutes en théorie !
Mais quelle histoire que celle de ce périph’ ! Relatée dans un livre récemment réédité « Des fortifs au périf », on y apprend comment, dans l’après-guerre, Paris doit répondre à la forte croissance démographique et adapter ses infrastructures. C’est sur la zone qui borde les fortifications décidées sous le règne de Louis-Philippe par le président du Conseil des Ministres, Adolphe Thiers, afin de « défense de la capitale contre des ennemis étrangers », qu’est né le boulevard périphérique.
L’enceinte de Thiers tombera rapidement à l’abandon et pendant plusieurs années, les terrains bordant l’enceinte vont devenir des terrains vagues qui accueilleront les populations les plus pauvres de la capitale et seront surnommés « la zone ». Dès 1940, il est envisagé d’y créer une voie circulaire qui ferait le tour de Paris. La Seconde guerre mondiale va passer par là et il faudra attendre 1958 (il fut inscrit au plan d’urbanisme de la ville de Paris en 1959) pour que ce chantier commence à prendre vie et les années 1970 pour que son dernier tronçon, celui reliant la porte Maillot à celle d’Asnières, soit achevé.
En quelques chiffres :
Le boulevard périphérique de Paris mesure 40 mètres de large en moyenne, franchit par deux fois la Seine, traverse 9 faisceaux de voies ferrées, 17 lignes de métro et 66 voies routières, comporte 44 diffuseurs dont 6 échangeurs autoroutiers et quelques 128 ouvrages d’art. Environ 200 agents de la Préfecture de Police (compagnie de la circulation) et 30 de la mairie de Paris (section de l’exploitation) collaborent au poste central d’exploitation. Les véhicules qui circulent sur le périphérique parisien doivent avoir une hauteur maximum de 4,75 mètres. 40 % du tracé sont en tranchée, dont quelques sections couvertes, 8 véhicules de police le jour (4 la nuit) surveillent en permanence le périphérique ainsi que 18 radars automatiques fixes. 24 écrans phoniques anti-bruit, 44 ha d’espaces verts, fleuris et boisés, 10 000 arbres en bordure du périphérique. A l’heure actuelle, la mairie de Paris mise plutôt sur la mobilité douce. Petit à petit, le périph’ se transforme, la vitesse est limitée à 70 km/h et un projet de déclassement est étudié à l’horizon 2024.
A l’occasion des Jeux Olympiques, une voie olympique sera créée sur le boulevard périphérique et réservée aux athlètes, médias, officiels, secours et forces de l’ordre, exceptée la partie sud, entre les portes de Versailles et de Bercy. Elle devrait être équipée de radars qui seront dédiés au contrôle de ces files « olympiques ». Ces cinq radars viendront s’ajouter aux dix-huit déjà présents mais ils auront pour mission spécifique le contrôle de ces files « olympiques ». Capables de lire les plaques minéralogiques et de compter le nombre de passagers par véhicules, ils auront pour fonction de sanctionner ceux non accrédités qui utiliseraient ces voies entre 6 h du matin et minuit. Les contrevenants encourront une amende de 135 euros.
Quelques anecdotes :
- en 2007, vingt-cinq tonnes de viande tombées d’une benne de camion se sont répandues sur la chaussée, bloquant la circulation toute une journée ;
- en 2010, des poneys échappés d’un centre équestre ont aussi emprunté le célèbre boulevard ;
- la même année, un cortège de mariage s’est arrêté sur l’artère et un participant s’est livré à quelques pas de danse avant d’être interpellé ;
- le 1er février 2012, dans un véhicule en panne protégé par la police, une policière a mis au monde le bébé de la passagère, une petite fille avant l’arrivée des secours ;
- la police se souvient aussi de ce « miracle » : un homme en fauteuil roulant faisait la manche sur une bretelle d’accès. Le temps que la police arrive sur les lieux, il s’est levé, a plié son fauteuil et a pris la fuite.
Et la petite histoire de l’histoire de France : avant le périphérique, il y avait la Route de la Révolte. C’est le nom d’une ancienne voie construite pour relier Versailles à Saint-Denis et Compiègne tout en évitant Paris. Cette voie n’était qu’un petit chemin dans les bois, dans un état pitoyable, à tel point que le cortège funèbre de Louis XIV s’était embourbé dans un virage en se rendant à Saint-Denis. Louis XV aurait alors exigé en 1750 que la voie alors appelée « route des princes » devienne carrossable pour lui permettre de rejoindre sa fille Louise de France, prieure au Carmel de Saint-Denis. Le monarque méfiant voulait éviter Paris et les Parisiens qui s’étaient soulevés dans la capitale pour différentes raisons : arrestations arbitraires, trafic de blé et autres mesures de justice impopulaires. Ce détour ajouta à la fureur des Parisiens et la « route des princes » devint la « route de la Révolte ». Cette route semble décidément liée à l’histoire de Louis XV, car son propre convoi funèbre suivra également ce tracé en 1774, de Versailles jusqu’à la basilique de Saint-Denis pour son inhumation.
Le Guide du Routard
C’est en 1970 que l’aventure commence ! Ce sont deux étudiants voyageurs, Philippe Gloaguen et Michel Duval, qui ont lancé l’aventure. Après deux mois de voyage sur la Route des Indes, Philippe Gloaguen propose au fondateur du journal « Actuel » Jean-François Bizot le récit de ce roadtrip, pas moins de vingt-deux pays traversés pour arriver à Katmandou. Il en résultera un article sur l’Inde et l’idée d’un guide de voyage au ton décalé qui propose à ses lecteurs des astuces pour voyager à très bon marché.
Après avoir été refusé dix-neuf fois, en avril 1973 le Guide du Routard, considéré comme un guide « hippie », voit le jour chez un petit éditeur, Gedalge. Il se vend à huit mille cinq cents exemplaires. Mais, à peine lancé, il manque de succomber car un autobus écrase l’éditeur (qui était sourd) et c’est la faillite de Gedalge ; le Guide du Routard se retrouve sans éditeur.
En 1975, Hachette décide d’investir sur le phénomène et quatre volumes sortent en librairie. Pour la couverture, le dessinateur Solé a concocté un croquis qui aura même l’honneur d’entrer au musée de la BD d’Angoulême. Cinq ans plus tard, la collection compte dix titres et franchit le cap des cent mille exemplaires. Pierre Josse rejoint Philippe Gloaguen comme futur rédacteur en chef. Entre 1980 et 1990, le nombre de titres a doublé et « Le Routard » est devenu une marque déposée.
Il faut noter l’évolution du logo ; pour mieux coller à son temps, le marcheur a abandonné son pantalon à pattes d’éléphant et ses pataugas, ses cheveux ont raccourci et il s’est mis à porter une montre au poignet. Avec les éditions 2000, sa moustache a même définitivement disparu, sa taille a rapetissé de manière à laisser la place à des photos illustrant le pays. Et aussi les évolutions : technique dans les années 90 où les guides s’offrent des cartes en couleur, technologique en 1996 avec la création du web du Routard.
Au catalogue du Routard, on trouve aujourd’hui : une édition gastronomique, un site Internet routard.com lancé en 2001, petits restos des grands chefs, des guides de conversation en format poche, des guides uniquement dédiés à l’exploration d’une ville, G’Palémo, un guide de conversation révolutionnaire qui permet de se faire comprendre dans un pays dont on ne connaît rien de la langue, « LOok » la première application Routard sur iPhone : un outil pour se faire comprendre partout dans le monde grâce à plus de huit cents dessins autour des thèmes indispensables pour le voyage, Le Routard Magazine lancé en mai 2021 et positionné haut de gamme … qui cible ceux qui ont les moyens de leurs envies et qui sont avides de découvrir le savoir-faire artisanal et les richesses artistiques de nos régions, en phase avec les priorités sociétales et environnementales.
Le Routard, c’est : 55 millions d’exemplaires vendus depuis sa création, 150 ouvrages publiés et 2,5 millions d’exemplaires édités chaque année, dont un tiers sur les régions françaises. Un exemplaire du Routard se vend toutes les huit secondes. Malgré le temps, le Routard tient à ses valeurs et la Charte de routard, publiée dans tous les guides, rappelle les voyageurs à leurs devoirs : « A l’étranger, l’étranger c’est nous » !