La « Deudeuche » : quels bons souvenirs …
La Citroën 2 CV pour « deux chevaux » familièrement appelée « deuche ou deudeuche » est une voiture populaire française produite par Citroën entre le 7 octobre 1948 et le 27 juillet 1990. Avec plus de cinq millions d’exemplaires, elle fait partie des dix voitures françaises les plus vendues de l’histoire.
Origine des chevrons (évocation d’André Citroën)
André Citroën, ancien élève de l’Ecole Polytechnique, découvrit lors de son voyage de noces en Pologne que l’un de ses parents avait mis au point un procédé d’engrenage aux dents taillées en V pour sa minoterie. Dès 1901, revenant à Paris, il adapta cette technique à l’industrie de l’acier, déposa plusieurs brevets et devint le premier industriel à fabriquer ces engrenages en V dit à pignons et à chevrons qui se caractérisaient par un fonctionnement plus silencieux. Ainsi par ce nouveau procédé, les commandes affluèrent de tous les pays plaçant l’engrenage français au summum de la qualité. Malgré le rachat par Michelin, puis par Peugeot, l’emblème de Citroën est toujours resté un double chevron.
Une voiture futuriste
En 1937, deux ans après le décès d’André Citroën, Michelin place Pierre Boulanger comme patron dont l’idée est de créer une voiture destinée aux classes sociales du monde rural et à faibles revenus, le souci premier étant de permettre à l’industrie Michelin d’accroître son activité de pneumatiques : la longue carrière de la 2 CV commence… Au départ, sa diffusion est cependant très lente. Le stock d’acier étant faible, l’Etat français réserve sa matière première à Renault devenu Régie Nationale qui produit en 1947 la 4 CV : concurrente directe de la 2 CV dont la production n’est que de quatre unités par jour. De plus, lors de sa présentation au salon de Paris en octobre 1948, Vincent Auriol, président de la République, n’apprécie pas cette nouvelle voiture.
1949 : la production est lancée très lentement : 876 unités puis 6 200 en 1950. Entre 1948 et 1959, le modèle A sera fabriqué à 125 573 exemplaires. En 1961, avec l’introduction des versions améliorées, la production atteindra 232 551 voitures. Au total, en quarante ans, près de 5 115 000 « deudeuches » sont officiellement sorties des usines, auxquelles il faut ajouter deux millions de « Dyane » et de « Méhari ».
Un cahier des charges draconien
Pour que cette toute petite voiture (TPV) soit accessible à toutes les classes sociales, Pierre Boulanger définit un cahier des charges composé ainsi : cette TPV doit avoir deux chevaux fiscaux, quatre places assises, transporter cinquante kilos de bagages, rouler à la vitesse de 60 km/h, posséder une boite à trois vitesses, un entretien facile (dix francs par mois), avoir des suspensions permettant de traverser un champ labouré avec un panier d’œufs sans en casser un seul, ne consommer que trois litres aux cent kilomètres et être conduite facilement par un débutant. Le slogan publicitaire : « Voilà 4 roues sous un parapluie ». La petite voiture va faire son chemin. Entre 1953 et 1980, 1 420 exemplaires de 2 CV berline seront choisis par la gendarmerie pour sa maniabilité, sa tenue de route sur n’importe quel revêtement même sur la neige. D’autres services administratifs prendront des versions fourgonnettes, tel EDF-GDF, reconnaissables à leur couleur bleue-ciel, spécialement créée par Citroën en référence à la campagne commerciale du compteur bleu (1967) ainsi que les PTT et les pompiers. L’évolution des modèles va croissante.
Publicité et cinéma en font une vedette
Dans le domaine de la publicité, elle fera des merveilles ; nous la verrons sillonner les routes du « Tour de France », en couleur rouge et blanche pour vanter une marque de saucisson ; elle participera à un rallye peinte en rose pour la prévention et le dépistage du cancer du sein. Notre petite voiture sera une vedette au cinéma dans « Le corniaud » (1964), la série des gendarmes de Saint-Tropez : souvenez-vous des courses effrénées avec la religieuse, James Bond 007 avec Roger Moore « Rien que pour vos yeux » (1981) et la jolie 2 CV rouge dans « Boule et Bill » (2013).
Il faut bien reconnaître que la grande famille des 2 CV s’est illustrée dans tous les domaines. Cette petite voiture était très convoitée, chacun la voulait mais, car il y a toujours un mais, son déclin s’annonçait au début des années 1980 à cause des règlementations de plus en plus strictes en matière de sécurité. La « Deudeuche » est de moins en moins produite, la mode se porte sur d’autres modèles plus modernes de la marque Citroën. En 1988, la production de la 2 CV est stoppée à l’usine de Levallois-Perret et, le 27 juillet 1990 à 16 h 30, cette voiture qui défia les époques et unifia toutes les classes sociales par son simple usage prend officiellement fin.
(Propos recueillis dans « 2 CV magasine »)