Le Caravage, l’artiste rebelle du clair-obscur
Né en 1571, Michelangelo Merisi, dit Le Caravage, va révolutionner la peinture italienne du XVIIème par le réalisme de ses toiles et par son usage novateur du clair-obscur, et devenir le plus grand peintre naturaliste de son temps.
Son nom d’artiste provient de cette petite commune de Lombardie, Caravaggio, où il passa son enfance. Son père y travaillait comme contremaître, maçon, architecte et intendant du marquis de Caravaggio. A 13 ans, il entre comme apprenti dans l’atelier du peintre milanais Simone Peterzano, élève du Titien (1540-1596) où il reste quatre ans. Il revient ensuite à Caravaggio puis, en 1592, part pour Rome. Il y mène une vie difficile, travaillant pour le compte de peintres comme Giuseppe Cesari, dit le Cavalier d’Arpin (1568-1640), peintre attitré du pape. Il peint d’abord des scènes de genre comme Garçon avec un panier de fruits (1593) ou Les Musiciens (1595) ; la peinture de scène de genre représente des scènes contemporaines prises sur le vif.
Remarqué par le cardinal Francesco Maria Borbone del Monte (1549-1626) qui lui achète Les Tricheurs, Le Caravage loge à Rome au palais Madame (actuellement immeuble du Sénat) à partir de 1597. Ce puissant protecteur permettra au Caravage de recevoir des commandes du clergé pour la décoration des édifices religieux : Le martyre de Saint-Matthieu (1599), La Conversion de Saint-Paul sur le chemin de Damas (1600). Ces tableaux très novateurs, qui allient mouvement, ombre et lumière, seront très remarqués ; les corps humains sont naturalistes avec une mise en évidence de la musculature tandis que l’artiste joue avec le contraste lumière-obscurité, grande innovation esthétique, que l’on retrouvera au XXème dans le cinéma et la photographie. Sur un fond sombre, la scène principale est éclairée comme une scène de théâtre avec un projecteur, ce qui accentue considérablement les contrastes ombre-lumière.
Mais l’idée même de faire carrière le répugne. C’est un rebelle. Son mode de vie, tout comme son œuvre, est une provocation constante, un affront à la morale. Il prend pour modèle des gens du peuple, des mendiants, des prostituées et des voyous ; il aime se bagarrer et est aussi habile à l’épée que virtuose du pinceau. Il est mêlé à des affaires de mœurs et à des affaires criminelles et fait plusieurs séjours en prison et à l’hôpital.
Cependant, son génie pictural ne passe pas inaperçu. Sa renommée dépasse les limites de Rome et se répand à toute l’Italie. Son réalisme parfois violent Judith décapitant Holopherne (1598) heurte certaines sensibilités et nombre de ses tableaux sont refusés.
Le tempérament violent du Caravage va bouleverser sa vie. En 1606, au cours d’une rixe, il tue en duel Ranuccio Tomassoni, le chef de la milice de son quartier. Condamné à mort, il s’enfuit de Rome en 1607. Commence alors une vie errante : Naples, Malte, la Sicile puis à nouveau Naples. Il continue à peindre et à produire des chefs-d’œuvre, comme L’enterrement de Sainte Lucie (1608) ou Saint Jean-Baptiste (1609). En 1610, il apprend que le pape est disposé à lui accorder sa grâce. Il s’embarque pour Rome, mais lors d’une escale à Palo, il est arrêté et jeté en prison. Relâché quelques jours plus tard, son bateau est déjà reparti. Il décide de faire le trajet à pied et parvient en Toscane à Porto Ercole à une centaine de kilomètres. Mais il a contracté la malaria et il décède dans cette ville le 18 juillet 1610 à l’âge de 38 ans.