Le mur blanc
Pour ce numéro de janvier, le mois des étrennes et du bonheur partagé, j’ai sélectionné ce poème d’un auteur classique que je rencontre régulièrement à l’Académie des Poètes Classiques de France à Paris, M. Daniel Ancelet.
Voici donc…
Le mur blanc
Deux hommes partageaient une même chambrée,
Dans un grand hôpital d’une banlieue aisée.
L’un pouvait se lever une heure quelquefois,
L’autre restait au lit sans avoir d’autre choix.
Le premier lit était à côté des fenêtres,
Son occupant disait ce qu’il voyait paraître,
Le paysage offert à ses yeux chaque jour,
Afin que son voisin en profite à son tour :
De grands jardins en fleurs hantés de jeunes filles,
Des gamins qui jouaient à courir, ou aux billes,
Des promeneurs divers, quelques bonnes d’enfants
Qui poussaient des landaus en devisant gaiement.
Mais le conteur mourut, l’autre voulut sa place,
Qu’on l’aide à se lever pour regarder en face.
Mais à peine debout, à son étonnement,
Il ne vit face à lui qu’un immense mur blanc.
-Mon Dieu, s’exclama-t-il, quel est ce sortilège,
Pourquoi donc m’avez-vous tendu ce vilain piège ?
L’infirmière expliqua : le mort ne voyait rien,
Mais ses mots ne visaient qu’à faire un peu de bien,
Aveugle, il inventait de riantes images,
Afin, pour son ami, d’en orner chaque page…
De mon conte, écoutez cette moralité :
Un bonheur qu’on partage en est multiplié.
Daniel Ancel
Un bonheur qu’on partage en est multiplié.Daniel Ancel