Le Fest-Noz sous les projecteurs
La Bretagne est en fête : le fest-noz a été inscrit le 5 décembre dernier au patrimoine culturel immatériel de l’Unesco.
Mais qu’est un fest-noz (fête de nuit en breton). De tout temps, les Bretons ont aimé la danse. Les grands travaux ruraux : moissons, battages, arrachage de pommes de terre, ramassage des pommes à cidre rassemblaient de nombreux travailleurs, hommes et femmes. Les repas, où étaient seulement invités ceux qui avaient participé aux travaux manuels, étaient l’occasion de rondes chantées, joutes orales, jeux de force et petits concours de danse. Du tabac récompensait les hommes et des rubans, les femmes. Jusque tard dans la nuit, les rondes se succédaient, stimulées par le sonneur et martelées par les sabots de bois au son des bombardes, binious, accordéons et clarinettes.
Les danses avaient quelquefois une fonction utilitaire comme lors de la réfection des aires à battre les céréales au fléau (la danse de l’aire neuve « dañs al leur nevez ») ou la confection du sol en terre battue d’une maison. Et que dire des noces qui pouvaient durer trois, voire quatre jours et rassembler jusqu’à deux mille invités. On dansait dès la sortie de l’église, sur le chemin menant à la salle du banquet, en attendant les viandes (la danse du rôti, dañs ar rost).
Les jeunes gens se mettaient en valeur rivalisant d’endurance pour résister à la fatigue d’une danse avec des pas complexes et qui pouvait durer parfois très longtemps.
L’église a tenté d’interdire les danses « kof-a-kof » (ventre contre ventre ou danses de couple) mais tolérait que les danseurs se tiennent par le petit doigt, voire par l’intermédiaire d’un mouchoir.
Puis vient le temps de la mécanisation avec les arracheuses de pommes de terre, entraînant la fin des travaux collectifs et dans les années 30, la presque totale disparition des fest-noz. Mais c’était sans compter avec l’attachement de quelques-uns pour leur culture et notamment les cercles celtiques qui le remettent à l’honneur dans les années 50, essentiellement en Haute-Cornouaille ; ils prennent alors la forme de bals, ouverts à tout public avec scène surélevée, buvette. Les chaînes devenant trop importantes, les musiciens et chanteurs en sont rapidement dissociés pour une installation avec estrade et insonorisation.
Dès 1972, Alan Stivell le popularise ; beaucoup de jeunes découvrent alors la musique et la danse bretonnes et s’en emparent ; petit à petit, le fest-noz devient une manifestation urbaine en adéquation avec son temps, exprimant les valeurs culturelles de la société bretonne contemporaine tout en respectant l’esprit de la tradition.
Aujourd’hui, plusieurs centaines de fest-noz sont organisés chaque année, tant en Bretagne que dans d’autres régions de France, rassemblant des hommes et femmes de toute génération dans le plaisir d’une danse collective.