Le pire et le meilleur
Bonjour. Je réfléchis à cet édito, lundi 27 janvier, le jour du 80e anniversaire de la libération d’Auschwitz-Birkenau. Ici, dans ce seul camp, plus d’un million de personnes y furent sauvagement assassinées. Le pire. Et le meilleur, avec ce prêtre, Maximilien Kolbe, qui s’avance devant les S.S. pour proposer de mourir à la place d’un homme qui supplie de lui laisser la vie car il pense à sa famille. Le meilleur, pendant quinze jours de mort lente de faim et de soif dans une cellule de 10 m2, dix hommes vont avancer vers la mort en chantant leur espérance de la résurrection : aujourd’hui quand on va à Auschwitz, on voit cette même cellule avec seulement un cierge de Pâques au milieu de la pièce.
Le pire, on croit qu’on n’a plus rien à apprendre. Et puis on découvre ce qu’on n’imaginait pas, comme avec les viols de Mazan. Je n’avais jamais pensé qu’un mari puisse violer sa femme et la faire violer par des inconnus sous sédation chimique. Le pire. Et le meilleur, avec la dignité de Gisèle Pelicot, qui veut que ce moment de justice soit une leçon pour tous, un réveil des consciences. « Ils ne savent pas ce qu’ils font » dira Jésus sur la Croix.
Le pire un peu partout, avec les appétits des ogres qui sont prêts à tout pour s’emparer des richesses au mépris de tous les droits humains et de la vie de millions d’innocents. Gaza, Ukraine, Soudan, Nord Kivu…etc etc. Le pire avec des extrémistes religieux, chrétiens, musulmans, juifs, hindous … avec de belles déclarations de morale, qui s’allient à des hommes politiques sans scrupules et sans aucune considération des vies humaines. On est prêt sans sourciller à éliminer l’Ukraine ou Gaza ! Mais le meilleur existe dans le cœur d’hommes et de femmes déplacés et affamés sur les routes du monde. « Voilà bien les Pharisiens ! Vous purifiez l’extérieur de la coupe et du plat, mais votre intérieur à vous n’est que soif d’argent et de méchanceté ! Insensés ! » dit Jésus.
Ce pire a été vécu par Jésus, condamné par les élites politiques et religieuses, alliées comme bien souvent encore aujourd’hui. Des docteurs de la loi et des religieux savaient très bien rappeler les principes de bonne morale et stigmatiser ceux qui ne les vivaient pas. Sans sourciller, ils ont condamné Jésus, l’Innocent, à une mort infâme et terrible. Le meilleur, avec Jésus, qui vit l’absence de Dieu dans ce pire, car Dieu ne peut pas être dans le pire. Le meilleur est de porter silencieusement l’Amour de Dieu et des autres dans cette déréliction.
Nous allons fêter Pâques dans un mois, le 21 avril. Fête de l’espérance. Le meilleur est caché dans le pire. Des signes du meilleur nous sont donnés par les humbles, pour nous aider à devenir des hommes d’espérance, dans le secret du cœur et dans la solitude du monde. « La seule chose qui nous console de nos misères est le divertissement et cependant c’est la plus grande de nos misères. Car c’est cela qui nous empêche principalement de songer à nous » (Pascal) et qui nous fait perdre insensiblement toute espérance. L’homme de l’espérance, c’est l’homme de l’attente, exigeante, éveillée dans la lumière la Résurrection. La violence de l’espérance, c’est de frapper sans cesse à la porte du Cœur de Dieu. Cette violence de l’espérance se fait dans la confiance absolue que Dieu ne nous abandonne pas et qu’il va répondre : la Résurrection de Jésus en est le signe définitif.
Frère Baudoin, prêtre.