Les bouleversements de la population mondiale
Pendant trois semaines à partir du 16 novembre dernier, le journal La Croix a exploré le bouleversement de la population mondiale, en présentant tous les jours un aspect différent.
L’évolution de la population
Selon le démographe Hervé le Bras, l’explosion démographique est derrière nous : « le taux de croissance de la population mondiale a atteint son maximum, à 2 % par an, dans les années 1970-1975… Ce taux, dorénavant de l’ordre de 1 %, continue de baisser. Alors certes la population va continuer à croître. Mais l’explosion est derrière nous. Les effectifs plafonneront vraisemblablement vers 2065 et n’atteindront probablement pas les dix milliards d’humains… La croissance démographique a changé de nature. Il y a cinquante ans, la plupart des pays en développement avaient une fécondité très élevée. Aujourd’hui, plus de deux pays sur trois sur la planète ont une fécondité inférieure au seuil de 2,1 enfants par femme qui assure le remplacement des générations ».
Des baisses et des hausses record de population :
- cinquante-cinq pays devraient voir leur population diminuer d’ici à 2050, selon les projections de 2019 des Nations Unies. La population chinoise devrait légèrement diminuer, passant de 1,44 milliards à 1,4 milliards alors que la population de l’Inde continuera à croître et la dépassera, passant de 1,38 milliards aujourd’hui à 1,64 milliards en 2050 ;
- 23 % : telle est la diminution attendue pour les 6,9 millions d’habitants de la Bulgarie qui détient le record en pourcentage. Les pays d’Europe centrale et orientale sont particulièrement affectés par les baisses de population ;
- neuf pays vont concentrer à eux seuls plus de la moitié de la croissance de la population mondiale d’ici à 2050. À savoir, par ordre de croissance : l’Inde, le Nigeria, le Pakistan, la République démocratique du Congo, l’Éthiopie, la Tanzanie, l’Indonésie, l’Égypte et les États-Unis.
Un vieillissement de la population
D’ici à 2050, une personne sur six dans le monde aura plus de 65 ans, contre une sur onze en 2019.
En trois siècles, l’espérance de vie à la naissance a plus que doublé. Et ce formidable bond en avant s’explique à la fois par la baisse de la mortalité infantile de l’ordre de 60% en trente ans et un allongement très important de la durée de vie, qui a progressé de plus de vingt ans en un demi-siècle. Alors qu’en 1950, dans le monde, les femmes décédaient en moyenne à 48 ans et demi, en 2020, elles dépassent les 75 ans et les prévisionnistes misent désormais sur un peu plus de 79 ans en 2050. Les hommes sont, eux, toujours en retrait de quelques années mais leur espérance de vie est tout de même passée de 45,5 ans en 1950 à 70,8 ans aujourd’hui pour grimper encore possiblement à 74,5 ans en 2050. Conjuguée à l’augmentation de l’espérance de vie, il faut ajouter une baisse de la natalité, qui décline dans les pays développés au fur et à mesure qu’ils s’enrichissent, mais aussi ailleurs dans le monde. Actuellement, en Europe et Amérique du Nord, une personne sur quatre pourrait avoir 65 ans ou plus en 2050, contre une sur six environ aujourd’hui. En Chine et en Asie du Sud-Est aujourd’hui, une personne sur neuf a plus de 65 ans mais ce chiffre sera également d’une personne sur quatre en 2050.
Le développement démographique, un atout ou un frein au développement économique ?
Un pays, dans lequel la part des jeunes dans la population augmente et le taux de fécondité diminue, peut récolter les fruits d’un « dividende démographique », un phénomène de hausse de la productivité économique qui se produit lorsque le ratio de la population active par rapport au nombre de personnes à charge s’accroît. La population dispose alors de ressources pour investir dans l’éducation des enfants, épargner et investir dans l’appareil productif.
Le taux de dépendance démographique est un indicateur clé pour estimer le potentiel de développement d’un pays. Plus il se rapproche de 50 % et plus les perspectives sont favorables. C’est le nombre moyen de personnes de moins de 15 ans et de plus de 64 ans, rapporté aux personnes en âge de travailler (de 15 à 64 ans) :
- 110 % : c’est le taux de dépendance démographique du Niger,
- 45 % : c’est le taux de dépendance démographique en Asie du Sud. Il atteint 49 % en Amérique latine,
- 55 % : c’est le taux moyen de dépendance démographique dans l’Union européenne, du fait du poids croissant des personnes âgées de plus de 64 ans.
Les pays asiatiques et, dans une moindre mesure, les pays d’Amérique latine ont bénéficié, ces dernières décennies de cet effet de structure avec un rapport entre actifs et inactifs très favorable. Toute la question est désormais de savoir si l’Afrique, et en particulier l’Afrique subsaharienne qui n’est qu’au début de sa transition, sera en mesure de percevoir à son tour le dividende démographique.
Le journal abordait bien d’autres sujets : comment subvenir aux besoins de neuf à dix milliards d’humains, la religion et la démographie, la place des jeunes dans une société vieillissante, comment adapter nos sociétés au vieillissement, l’impact de l’immigration, les enjeux géopolitiques, …, tant de sujets très intéressants liés aux aspects démographiques à approfondir dans nos prochains numéros ?