Paix sur la terre
» Gloire à Dieu au plus haut des cieux
et paix sur la terre aux hommes qu’il aime » (Luc 2,14)
L’évangile de saint Luc raconte l’apparition de l’Ange du Seigneur à des bergers de Bethléem dans la nuit de Noël. Il leur annonce qu’un Sauveur est né dans leur voisinage. Alors, un chœur céleste se joint à l’ange et entonne le chant de louange ci-dessus. Tous les chrétiens connaissent ce récit et tous les chrétiens associent la paix à la fête de Noël. Mais de quelle paix s’agit-il ? Ce chant de louange, qui est aussi une bénédiction, restreint la paix à ceux que Dieu aime. Que devons-nous comprendre ?
Entre les nations, la situation n’est pas non plus très pacifique. La mondialisation des échanges économiques, le brassage des cultures étaient censés faire progresser la paix sur la planète. Qu’en est-il vraiment ?
Peut-il y avoir un gendarme assez puissant pour contrecarrer l’appétit hégémonique de certaines nations, limiter la prédation économique de certaines entreprises ou venir faire la paix dans les familles divisées. Oui, atteindre la paix est bien compliqué et peut-être utopique.
Alors quelle est cette paix annoncée par l’Ange ?
L’Ange commence par célébrer la gloire de Dieu. Nous pensons nous, que la paix demande plutôt une bonne négociation, l’accord sur des conditions acceptables et acceptées par tous les partis en conflit. Sauf qu’il ne peut s’agir, dans ce cas, que d’une paix humaine, c’est-à-dire fragile, réversible, parce que tout change en permanence et que de nouvelles sources de conflit apparaîtront nécessairement. L’Ange nous dit qu’il n’y a pas de paix possible sans que Dieu soit glorifié, c’est-à-dire que l’option spirituelle et non les seules contingences matérielles, soit le véritable contrat qui unit tous les hommes.
La paix sur la terre est pour les hommes que Dieu aime. Qui sont-ils ? On est là devant une traduction difficile. L’expression grecque utilisée par saint Luc est « anthropois eudokia ». Parfois traduit par « hommes de bonne volonté », mais cela peut laisser croire que le principe de la paix se trouve dans la volonté de l’homme. La bible de Jérusalem traduit par « hommes qu’il aime », plus près du sens littéral. Une autre bible traduit par « paix aux hommes car il les prend en grâce ». Eudokia signifie « bon plaisir », « disposition bienveillante ». Son utilisation par l’évangéliste, nous ne pouvons guère en douter, veut marquer que l’initiative et le principe de la paix sont en Dieu, non en l’homme.
Mais la vie est un combat
La paix est-elle purement extérieure à notre personne ? Nous n’avons sans doute jamais connu de situation de guerre autrement que par les actualités télévisées. Même si la violence des faits nous a émus ou révoltés, c’étaient des faits lointains, qui n’ont pas changé nos conditions de vie personnelles. Pourtant beaucoup de conflits nous traversent au quotidien, car nous en sommes les acteurs : ceux liés aux choix des gouvernants (nous vivons ce moment), au choix des valeurs qui vont guider notre conduite, à la détermination de nos priorités, etc. La vie est un combat, une épreuve destinée à nous faire grandir. Durant notre existence terrestre, nous vivons une adolescence spirituelle et recherchons un point d’équilibre entre, d’une part, les nécessités et les contingences de notre vie incarnée et, d’autre part, l’appel et la préparation à la vie plénière dans l’Esprit.
Ce n’est pas un combat contre les autres, ni d’ailleurs contre soi. C’est une lutte intérieure, une transformation, pour que se manifeste ce que nous sommes vraiment : des hommes et des femmes qui sont les sujets de la bienveillance divine, images du divin, soucieux de coopérer pleinement avec la maturation spirituelle qui s’opère en nous et par là, rendre gloire à Dieu.
Alors nous serons en paix, en nous-mêmes et porteurs de paix autour de nous.
Daniel Pasquiet