Regarde saint Christophe et va-t-en rassuré
Dans un numéro axé sur les transports, l’évocation de saint Christophe, patron des voyageurs, surtout des automobilistes, s’impose. Son effigie est familière : une sorte de géant qui marche dans l’eau et porte sur ses épaules un petit enfant. Mais qui est-il exactement ce saint protecteur de ceux qui prennent la route ? Si populaire soit-il, c’est un personnage légendaire, vénéré depuis le Ve siècle en Asie Mineure puis dans tout l’Occident chrétien. C’est en fait à sa légende qu’il doit son nom qui, en grec, signifie « porte Christ »
D’après Jacques de Voragine (« la Légende dorée » XIIIe siècle) celui qu’on appellera Christophe était un Cananéen d’allure terrible qu’on nommait : « le Réprouvé ». Désireux de connaître le Christ dont il avait entendu parler, il se mit à sa recherche et rencontra un ermite auquel il demanda conseil :
– « Ce roi que tu cherches souhaite que tu jeûnes souvent,
– pour moi c’est impossible car j’ai grande faim,
– eh bien que tu fasses de nombreuses prières, – je ne sais pas prier.
– alors, va te poster au bord de ce fleuve tumultueux et tu aideras les gens à le traverser,
– ça, je le ferai avec plaisir ».
C’est ainsi que notre géant devint passeur et remplit sa tâche sans problème… jusqu’au jour où un tout jeune enfant lui demanda de le traverser. Quoi de plus aisé pour « Réprouvé » et pourtant plus il avançait, plus son petit fardeau se faisait pesant au point qu’il faillit succomber. Le questionnant sur son poids démesuré, l’enfant lui répondit : « c’est parce que je porte le poids du monde ». C’était l’enfant Jésus. Depuis ce jour-là, le passeur eut nom Christophe. Puis, ayant planté son bâton en terre, il fût bien surpris de le voir refleurir ! Il serait mort martyr.
S’il n’a pas été retenu au calendrier « Sanctoral » (propre des saints) par la réforme liturgique du concile Vatican II, il est toujours invoqué non seulement par les automobilistes et les touristes mais aussi par les portefaix, les fruitiers et lors des orages, des tempêtes, en temps de peste. Parmi les pèlerinages en son honneur, celui de Saint-Christophe-le-Jajolet (Orne) est le plus célèbre. Le dimanche suivant sa fête, le 25 juillet, on y vénère ses reliques puis on bénit les automobiles. Les médailles à son effigie sont innombrables ; savez vous que les cosmonautes d’Apollon 8 la portaient ? Jadis, dès l’acquisition d’une voiture, on se hâtait d’y mettre sa médaille où souvent se lisait : « regarde saint Christophe et va-t-en rassuré ».
D’autres saints, qui eux, ne sont pas légendaires, portent ce nom dont le bienheureux Christophe de Cahors, disciple de saint François d’Assise, qui l’envoya en 1216 en France fonder des couvents de frères mineurs dont Mirepoix (Ariège) et celui de Cahors (Lot) où il mourut en 1272.
Aujourd’hui, saint Christophe ne risque pas le chômage entre touristes et automobilistes ! Mais n’oublions pas que l’invoquer, c’est avant tout prendre conscience de nos responsabilités et nous conduire en conséquence !