Semaines sociales de France : Religions et cultures, ressources pour imaginer le monde (Fin)
Renouveler la vision du monde avec les religions
Après avoir réfléchi sur les ressources du monde en novembre, sur les religions comme source d’espérance en décembre, nous terminons notre série d’articles sur les semaines sociales 2015 par le regard des différentes traditions religieuses sur l’utilisation de nos ressources.
Les traditions religieuses si diverses peuvent aider l’humanité à renouveler la vision de la mondialisation comme l’ont montré les représentants de trois religions : chrétienne, bouddhiste et musulmane qui ont partagé leur approche et cherché au coeur de leurs traditions ce qui pouvait les unir et les rapprocher en vue du bien de la famille humaine.
Toutes ces traditions interrogent la manière dont nous habitons le temps et la terre : « Pour la Bible, la terre est une création, a expliqué Luigino Bruni, professeur à l’université de Rome. Nous ne sommes pas propriétaires du monde dans lequel nous vivons. Nous l’habitons, il nous aime, nous nourrit et nous fait vivre. Mais nous sommes ses hôtes, nous y sommes en simples voyageurs. Les civilisations qui se sont avérées fécondes sont celles qui ont accueilli la terre et le temps comme un don ».
La tradition bouddhiste insiste, elle, sur l’effort que chaque être humain doit fournir pour faire un travail sur lui-même pour changer son attitude : « Nous sommes en danger à notre époque où le matérialisme a une emprise qu’il n’a jamais eue…. Nous n’arrêtons pas de manipuler le monde : l’homme manipule alors qu’il doit jardiner », a déclaré Philippe Cornu, président de l’Institut d’études bouddhiques. « Imaginer que nous sommes hors de la nature et ériger la culture comme une tour de Babel qui nous sépare de la nature, c’est absurde, c’est de l’orgueil. Pour arrêter la course folle dans laquelle l’humanité s’est emballée, il faut revenir en soi-même, à la source lumineuse pour redéployer le fil de la sagesse ».
La tradition musulmane soufie, explique le cheikh Khaled Ben Tounes, entend aussi réveiller les consciences, les ouvrir à lire la création et à marcher vers la fraternité et l’unité : « Avant toute chose, il faut aller vers l’intériorité, être attentif à la création. Il est temps que chrétiens, juifs, bouddhistes, musulmans, athés se retrouvent pour favoriser l’unité du monde ».
À leurs manières, les différentes traditions religieuses invitent les êtres humains à ouvrir les yeux pour découvrir la splendeur de la Création.
Mais c’est seulement en s’immergeant dans le tourbillon du monde, en acceptant la « conversation » proposée par le Père Henri-Jérôme Gagey, avec tous ceux qui s’efforcent de concevoir une issue humaine à ces dangers que les religions, et singulièrement la religion chrétienne, peuvent porter leur fruit, se proposer comme ressource.
Ce mouvement est en marche à travers les jeunes générations qui ont compris l’importance d’agir ensemble, comme en témoigne l’association Coexister – la clé pour vivre ensemble, mouvement indépendant de jeunes qui cherche à promouvoir la cohésion sociale grâce aux différences, dont les différences religieuses, à travers trois étapes :
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le dialogue qui permet d’apprendre à se connaitre,
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la solidarité qui permet de dépasser le cadre du dialogue en agissant ensemble,
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la sensibilisation pour devenir des agents de coexistence active dans les collèges ou les lycées.
A ce jour, dix-huit groupes locaux en France et un en Belgique ont déjà vu le jour, quinze autres sont en formation ; deux groupes Campus (Sciences Po et Dauphine à Paris) existent également et deux autres sont en cours de création.
Site de l’association Coexister
Alors, gardons confiance, conversons et qui sait si, armés d’humilité et de douceur, nous ne découvrirons pas de nouveaux chemins là où le matérialisme montre ses limites et où la violence s’avère une impasse ?
Véronique Schweblin