Silence radio !
Il fut un temps où les opérateurs radio à bord des bateaux ou des avions devaient respecter un temps de silence absolu par heure, au quart et au trois quarts. Pour quelle raison cette discipline s’est-elle imposée avec force de loi ? Parce que lorsque plusieurs opérateurs communiquent en même temps sur la même fréquence, les liaisons deviennent très rapidement inaudibles en un brouhaha assourdissant. Si un bateau ou un avion se retrouve dans une situation d’urgence ou de détresse, l’appel au secours risque fort de ne pas être compris, ni entendu. C’est pourquoi les autorités avaient décidé d’instaurer un silence radio de 3 minutes 2 fois par heure. Aujourd’hui les procédures ont été modifiées.
Il en va de même dans notre vie quotidienne, non pas en matière de communications radioélectriques mais dans le brouhaha de notre existence. Si nous prenons la peine de faire un peu attention à tout ce qui vient heurter notre esprit, nous nous rendrons compte du bruit infernal et des quantités d’informations qui nous assaillent. Sommes-nous capables d’en extraire l’essentiel, de trier le plus important, le plus urgent ?
Dans notre vie de foi, sommes-nous capables d’identifier notre frère, notre voisin qui lance discrètement des signaux de détresse ? Sommes-nous capables de discerner les appels de Dieu ? Assourdis par les bruits de nos vies, nous pouvons tracer notre chemin et passer à côté de ceux ou celles qui auraient besoin de nous ?
Comme le dit la chanson du Père Duval : « le Seigneur a frappé à tes volets mais toi tu dormais ». Ne ratons pas le coche, mettons-nous à l’écoute de notre environnement, à l’écoute de Dieu en prenant le temps régulièrement de faire silence dans nos vies, de réfléchir à tous ces évènements vécus et d’y discerner les appels qui nous sont adressés. Ce n’est pas dans le tintamarre de nos vies que nous pourrons aisément y arriver mais dans la recherche du calme intérieur.
Cette expérience, le prophète Elie l’a vécue : (1 Rois 19,11) « Sors, lui dit le Seigneur ; tu te tiendras sur la montagne, devant moi ; je vais passer ». Aussitôt un grand vent souffla, avec une violence telle qu’il fendait les montagnes et brisait les rochers devant le Seigneur ; mais le Seigneur n’était pas présent dans ce vent. Après le vent, il y eut un tremblement de terre ; mais le Seigneur n’était pas présent dans le tremblement de terre. Après le tremblement de terre, il y eut un feu ; mais le Seigneur n’était pas présent dans le feu. Après le feu, il y eut le bruit d’un léger souffle. Dès qu’Élie l’entendit, il se couvrit le visage avec son manteau, il sortit de la caverne et se tint devant l’entrée.
De même, Jésus nous invite au calme pour favoriser la communication avec Dieu : (Mt 6,6) « Mais toi, lorsque tu veux prier, entre dans ta chambre, ferme la porte et prie ton Père qui est là, dans cet endroit secret et ton Père, qui voit ce que tu fais en secret, te récompensera. »
Dieu est humble ; comme les personnes humbles, il n’aime pas le bruit, il demeure dans la discrétion et toujours en attente d’une réponse de notre part. Cette relation s’exprime dans la prière et le recueillement. C’est par ce moyen que nous pourrons initier le dialogue et l’action. Notre vie chrétienne passe par la prière, la méditation de sa Parole, le regard bienveillant et actif sur notre entourage. Le silence intérieur est le début de cette démarche intime.
Méditons sur ce qu’écrivait le maréchal Jean de Lattre de Tassigny dans son journal du 5 janvier 1943 : « La déchristianisation actuelle vient surtout de l’absence de recueillement… Nous vivons presque tous dans une agitation pour ainsi dire perpétuelle… Comment au milieu d’un semblable tourbillon réfléchir ? Comment se recueillir ?
Le recueillement exige, plus encore que la réflexion, le calme de notre intérieur et le silence. »
Yves Corvisy